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vendredi 10 février 2012

Bonga, la voix rauque de la décolonisation

Le Monde.fr 
11/02/2012
José Adelino Barcelo de Carvalho,
dit Bonga.
 
Ecoutez les videos en fin d'article.

Le chanteur Angolais, exilé en 1966 à Rotterdam par la dictature portugaise, publie son trentième album Bonga débarque de Lisbonne, la capitale portugaise berceau de la lusophonie. L'Angolais nomade porte un pardessus cintré à motifs gris et noir, des lunettes de soleil. Il trimbale une petite valise rouge et un long tube contenant son instrument fétiche, la dikanza, une longue tige de bambou que l'on frotte d'une baguette en bois. Bonga Kuenda - c'est son nom de guerre -, 68 ans, vit près de Lisbonne, à Queluz, où les touristes visitent le château royal, ses azulejos et ses jardins. " C'est calme. Je dois être l'habitant qui fait le plus de bruit, tout le monde le sait car ma table est ouverte ", dit l'homme énergique et carré, sportif discipliné. 


Bonga aime les familles nombreuses, " car je suis un homme africain. Je n'ai que six enfants, nous étions neuf à la maison, c'était la fête tout le temps ". Il adore cuisiner le moemba - farine de manioc, mélangée au bongo et à l'huile de palme. Dans Hora Kota, " l'heure des sages ", son trentième album, qui sort le 13 février, il décrit une sorte d'internationale du haricot, le légume sec qui voyageait avec les marins lusitaniens, tout noir dans la feijoada brésilienne, tout blanc pour la catchupa cap-verdienne, le makunde de la farine angolaise, le haricot curé du Portugal... 

Quand Bonga parle, on retrouve par instants cet exceptionnel éraillement de la voix, ces inflexions exprimant d'emblée la cassure, la force arc-boutée et le vague à l'âme. Voilà quarante ans que cette voix séduit, étonne. Ce n'est pas seulement par son exotisme ni parce qu'elle met les nerfs à vif ou les sentiments en vrac. C'est parce qu'elle est unique, abrasive, résistante à tout - une qualité appréciée par Bernard Lavilliers, qui l'a embauché pour un récent duo, Angola, publié dans Causes perdues et musiques tropicales, et repris dans Hora Kota. Cette force séduira aussi Marisa Monte, star brésilienne, avec qui il enregistre en 1998 pour l'excellent album Red Hot Lisbonne, un titre volcanique, Mulemba Xangola. 

Bonga est un habitué des tubes, et, en Europe, un public jeune et essentiellement féminin continue d'entonner en choeur Tenho uma lagrima no canto do olho, une sorte de samba (le semba vient d'Angola et a été transporté dans les cales de navires négriers) ou Mona Ki Ngi Xica (1976), modèle de blues luso-africain. 

José Adelino Barcelo de Carvalho, dit Bonga, est né en 1943 à Kipri, à une soixantaine de kilomètres de la capitale, Luanda. Le père, fonctionnaire, " greffier chez l'ecclésiaste ", est musicien amateur. 

" Il y avait la forêt vierge, et surtout l'odeur de la jungle, une odeur de fruits et d'herbes, très forte, chaude, qui m'a marqué. J'y retourne à présent, et j'en ramène du manioc que j'achète sur les bords du fleuve, et je respire, je respire, parce qu'en ville il n'y a que l'odeur du dollar. " Pour l'auteur prolifique (400 chansons revendiquées) Hora Kota est aussi l'occasion de faire le point sur l'Angola, un eldorado qui a tout, du pétrole, du gaz, des diamants, des eaux poissonneuses... mais que trente-sept ans de guerre civile ont mis sur le flanc et soumis à la corruption. 

Dans les années 1950, le guitariste et chanteur Carlos Liceu Vieira et le groupe Ngola Ritmos mélangent les musiques paysannes rituelles ou festives (le semba, le kazutuka, du carnaval de Luanda) avec les sons urbains. Carlos Vieira participe au mouvement africaniste surgi dans la banlieue de Luanda. Il sera à ce titre déporté au Cap-Vert en 1959, et enfermé au bagne de Tarrafal, comme de nombreux intellectuels opposants à Salazar. C'est une autre internationale lusitanienne qui se crée : celle de la résistance à la dictature. Le jeune José Adelino suit ce chemin, il prend le nom africain de Bonga Kuenda. Il rejoint la formation de son père accordéoniste, musicien de rebita, le style des pêcheurs de l'Ilha do Cabo, et fonde Kissueia (" la misère des quartiers pauvres " en kimbundu), un groupe où le commentaire de la situation coloniale passe par des formes traditionnelles africaines, détestées des Portugais. 

Une chape de plomb s'abat sur le Portugal, qui n'en sortira qu'en 1974, avec la " révolution des oeillets ". Champion du Portugal du 400 mètres, Bonga s'engage dans la lutte pour l'indépendance après avoir rejoint le club sportif Benfica de Lisbonne. Subissant les foudres de la PIDE, la police politique, il s'exile en Hollande en 1966, à Rotterdam, où vit une forte communauté cap-verdienne. 

Parmi eux, Joao Silva, dit Djunga di Beluca, un drôle d'énergumène plus tard ambassadeur du Cap-Vert en Hollande, mais qui, pour l'heure, produit les albums des vedettes communautaires, Voz de Cabo Verde, Luis Morais, Bana. Ce personnage pittoresque enregistre les deux albums qui ont ouvert la carrière de Bonga, Angola 72, qui comporte le titre Mona Ki Ngi Xica, et Angola 74, où trône Sodade, la chanson qui rendra Cesaria Evora célèbre. " Cette chanson était très prisée des musiciens cap-verdiens de Rotterdam avec qui j'avais enregistré. Son auteur, Amandio Cabral, avait publié un 45-tours - sur le label Monte Cara à Mindelo - , peu de temps auparavant. Cette chanson - qui évoque la déportation des Cap-Verdiens affamés vers les plantations d'Angola - concerne n'importe quel émigré, n'importe quelle femme battue ", commente Bonga. 

Devenu Disque d'or, Bonga fait la " une " des journaux néerlandais. Il est alors reconnu par la PIDE et doit fuir " en Allemagne, en Belgique ". En 1973, il arrive à Paris, au Quartier latin, où se mélangent alors les artistes africains, les Latinos, les Afro-Américains, les Brésiliens. " C'est là que je suis devenu artiste. Avec ma voix rauque, je suis devenu préposé à la nostalgie, j'allais au Discophage, rue des Ecoles, tout le monde venait. C'était un climat de fête, de vie. " 

A la fin des années 1980, Bonga rentre au Portugal. " Au fur et à mesure que je racontais mon histoire, je montais en grade dans l'estime d'une nouvelle génération de Portugais. Mais je ne pouvais toujours pas aller en Angola. En Angola libre, après la "révolution des oeillets", on s'est mis à chanter la révolution. Ça n'a pas duré, les guerres civiles ont commencé ", avec d'un côté le Mouvement pour la libération de l'Angola (MPLA), parti créé par le héros de l'indépendance, Agostinho Neto (1922-1979), soutenu par les Soviétiques et les Cubains et, de l'autre, l'Union pour l'indépendance totale de l'Angola (Unita), mené par Jonas Savimbi (1934-2002), qui servait les intérêts de l'Afrique du Sud de l'apartheid et des Etats-Unis. Bonga ne supporte ni l'un ni l'autre. 

" Les Angolais n'ont pas eu le temps de récupérer leurs racines ", ajoute Bonga, dont on écoutait les morceaux sous le manteau. " Voilà mon pire souvenir : composer des chansons qui ont contribué à l'histoire musicale de mon pays, et ne pas pouvoir y aller. " En 2003, Bonga revient à Luanda, pour un concert sur la place Kinaxixi. " Le public chantait les chansons qui avaient été interdites, alors j'ai compris qu'il fallait continuer. " 

Bonga aime encore le Luanda d'aujourd'hui, et l'Angola, constatant en riant (jaune) : " Les Chinois sont arrivés en masse et donnent du tonus à l'économie. Avec les Portugais tout allait plus lentement. Et puis les sectes brésiliennes comme le Reino de Deus ont proliféré. " De Luanda, il goûte la joie des rues, mais en souligne les navrantes inégalités (Kambua, chiens de riches choyés et chiens de pauvres sans pitance). Véronique Mortaigne 
Hora Korta

Prochaines dates de concert : les 9 et 10 mars à Paris (New Morning), le 30 à Montpellier (Victoires 2), le 31 Marseille (Docks des Suds).

© Le Monde

LA LUSOPHONIE, CULTURE PLANÉTAIRE
Bonga chante en kimbundu, l'une des langues les plus parlées en Angola, et en portugais, la langue officielle. Il y aurait plus de 200 millions de lusophones dans le monde, dont 185 millions (Portugal et le Brésil) pour qui le portugais est la langue maternelle. En 1996, la communauté des pays de langue portugaise (CPLP) a été créée pour promouvoir la lusophonie. Elle regroupe sept pays : le Brésil, le Portugal et ses anciennes colonies, Angola, Guinée-Bissau, Mozambique, Cap-Vert, Sao Tome-e-Principe et Timor-Oriental. Le portugais est la cinquième langue la plus parlée au monde. Certains pays, comme le Cap-Vert, ont développé une langue créole, mélange de portugais et de langues africaines, qui était celle de Cesaria Evora.

LUSAFRICA, LE LABEL QUI PUISE DANS LES RACINES DE L'AFRIQUE.
Bonga publie Hora Kota, son nouvel album, sur le label indépendant Lusafrica. La maison a été créée en 1988 pour la chanteuse capverdienne Cesaria Evora, morte le 17 décembre 2011. Fondée par le Franco-Capverdien José da Silva, Lusafrica produit en majorité des chanteurs lusophones, " mais pas uniquement, puisqu'il nous arrive de produire des artistes africains au gré des coups de coeur, comme le vétéran Boubacar Traoré, qui est malien, ou la jeune Sia Tolno, originaire de Guinée Conakri ", explique François Post, directeur des éditions et de la production.

Le Cap-Vert est encore très bien représenté chez Lusafrica par des artistes comme Tcheka, Teofilo Chantre, Mario Lucio, chanteur, musicien et ministre de la culture du Cap-Vert, ou la jeune Lura, qui prépare un nouvel album. José da Silva concède toutefois que " l'après-Cesaria Evora s'annonce difficile pour Lusafrica. Ce genre d'artiste ne court pas les rues. Mais ma spécialité, c'est de découvrir des talents, de travailler à long terme et d'en faire des artistes connus ". Parmi ses poulains, Lusafrica compte Nancy Vieira, une jeune artiste d'origine capverdienne qui vit au Portugal. Son dernier album, enregistré en 2011, No Ama, sortira en avril. Fondé sur un beau répertoire de mornas traditionnelles, il s'inscrit dans la continuité de Cesaria Evora.

Un catalogue de 3 000 titres
Aujourd'hui, Cesaria Evora est encore très présente à Lusafrica, comme une ombre tutélaire et bienveillante : " Une de mes missions, ajoute José da Silva, est de faire parler d'elle dans le monde, de divulguer ce catalogue extraordinaire, de préparer des albums d'inédits. "

Le label cherche de nouveaux moyens pour faire entendre ses voix, par le biais des réseaux sociaux ou des radios communautaires : " Lusafrica développe des artistes qui ont une image forte : Lura qui défend un patrimoine musical, Bonga qui symbolise une forme de résistance..., explique François Post. Par les images et les écrits disponibles sur le Net, nous contribuons à divulguer leurs histoires pour inviter le public à venir découvrir ces artistes lors de concerts. Internet permet de rendre l'univers de nos artistes accessible à des publics disséminés dans le monde entier. "

Lusafrica, qui s'est lié à une major du disque Sony pour assurer la distribution de certains albums, a parallèlement développé une société d'édition, Africa Nostra. La société est chargée de développer son catalogue, qui compte aujourd'hui près de 3 000 titres de musique africaine. Selon François Post, " il s'agit plus de musiques qui puisent dans le capital de l'Afrique. Les auteurs ne sont pas forcément africains, mais aussi cubains ou brésiliens. Ce qui sauve Lusafrica, c'est que nous exportons beaucoup, dans énormément de territoires. Si nous ne couvrions que la France, nous aurions mis la clé sous la porte ". Reste à trouver des fenêtres d'exposition, à une époque où la concentration des goûts et des productions industrielles pénalise la diversité.
Ariane Lecointre
 © Le Monde

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