03/07/2012
La porte de l’une des trois grandes mosquées de Tombouctou, la mosquée Sidi Yahia, a été entièrement détruite, lundi. Jusqu’à ce jour, les combattants islamistes avaient ciblé des mausolées, édifices considérés comme une hérésie par Ansar Dine.
Après avoir attaqué sept mausolées, les islamistes qui contrôlent la ville de Tombouctou, dans le nord du Mali, s’en sont pris, lundi 3 juillet, à l’une des trois principales mosquées du site classé au patrimoine mondial de l’Unesco. La porte menant à la mosquée Sidi Yahia, datant du XVe siècle, a été détruite à coups de pioches. "D’après les témoins, une dizaine de combattants sont arrivés devant la mosquée au saut du lit, rapporte Serge Daniel, correspondant de France 24 et RFI à Bamako. Ils ont totalement saccagé la porte en criant 'Dieu est grand'".
Exclusivité AFP : un mausolée détruit à coups
de pioches par des islamistes.
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Cette porte est précieuse à plusieurs titres. Des symboles et des insignes sont inscrits sur le bois de l’édifice, œuvre de l’artisanat ancestral de la région : "Cette porte, en particulier, possède des symboles qui ne sont pas directement liés à l’islam et qui sont issus du savoir-faire de Tombouctou", explique Lazare Eloundou-Assomo, responsable à l’Unesco du pôle Afrique du patrimoine mondial. Cette porte véhicule également une légende : selon la tradition, elle doit toujours restée fermée, sous peine qu’un malheur ne s’abatte sur la ville. "Les islamistes ont voulu prouver que cette porte n’est pas sacrée, explique le correspondant de FRANCE 24 et de RFI, c’est une démonstration de force."
"IL N'Y AURA PLUS DE MAUSOLÉE À TOMBOUCTOU: LA RELIGION L'INTERDIT"
Par Serge Daniel
Au risque de se mettre la population locale à dos, les islamistes font passer le message : "Si vous ne nous suivez pas, ce sera dur, parce qu’on est là pour appliquer la charia", poursuit en substance Serge Daniel. Car, contrairement aux bouddhas de la vallée de Bamiyan, en Afghanistan, détruits à l'explosif en 2001, la "cité des 333 saints" reste un lieu de culte ancré dans les pratiques religieuses des habitants.
L’attaque de la mosquée Sidi Yahia, joyau architectural de Tombouctou, et de sa porte à la symbolique ancestrale inquiète fortement les observateurs internationaux. "Si ces actes sont confirmés, cela signifie que la situation s’aggrave, s’alarme Lazare Eloundou-Assomo. C’est un crime de guerre inacceptable." La destruction de biens religieux à Tombouctou est passible de poursuites", précise Fatou Bensouda, le nouveau procureur de la Cour pénale internationale (CPI) : "Mon message à ceux qui sont impliqués dans cet acte criminel est clair : arrêtez la destruction de biens religieux maintenant. C'est un crime de guerre pour lequel mes services sont pleinement autorisés à enquêter", a-t-elle déclaré dimanche, à Dakar.
Affrontement entre deux islam
Par Serge Daniel
Au risque de se mettre la population locale à dos, les islamistes font passer le message : "Si vous ne nous suivez pas, ce sera dur, parce qu’on est là pour appliquer la charia", poursuit en substance Serge Daniel. Car, contrairement aux bouddhas de la vallée de Bamiyan, en Afghanistan, détruits à l'explosif en 2001, la "cité des 333 saints" reste un lieu de culte ancré dans les pratiques religieuses des habitants.
L’attaque de la mosquée Sidi Yahia, joyau architectural de Tombouctou, et de sa porte à la symbolique ancestrale inquiète fortement les observateurs internationaux. "Si ces actes sont confirmés, cela signifie que la situation s’aggrave, s’alarme Lazare Eloundou-Assomo. C’est un crime de guerre inacceptable." La destruction de biens religieux à Tombouctou est passible de poursuites", précise Fatou Bensouda, le nouveau procureur de la Cour pénale internationale (CPI) : "Mon message à ceux qui sont impliqués dans cet acte criminel est clair : arrêtez la destruction de biens religieux maintenant. C'est un crime de guerre pour lequel mes services sont pleinement autorisés à enquêter", a-t-elle déclaré dimanche, à Dakar.
Affrontement entre deux islam
Vue aérienne de la ville de Tombouctou.
(Photo via RFI : Alida Jay Boye. Timbuktu Manuscripts Project. Université d'Oslo)
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Jamais encore les islamistes du Nord-Mali n’étaient allés aussi loin dans leur volonté de détruire ce qui, à leurs yeux, constitue une hérésie : les symboles d’un "islam traditionnel malien, fondé par des cheikhs érudits entre le XIVe et le XVIe siècle", explique Malek Chebel, anthropologue des religions et spécialiste de l’islam. "En revenant de La Mecque, ces cheikhs ont établi des madrasas (écoles coraniques), exercé comme marabouts, ont été enterrés dans des mausolées en tant que saints. Or, l’islam dogmatique, littéraliste, qui prône une interprétation forcenée du Coran, interdit la vénération de qui que ce soit mis à part Dieu et son prophète Mahomet."
Or, les habitants de Tombouctou ont pour habitude d’aller s’incliner devant les centaines de mausolées qui jalonnent la ville, avant ou après les prières à la mosquée. Celui en l’honneur de Sidi Mahmoud est particulièrement fréquenté dans les périodes de sécheresse, pour prier pour la pluie. Cet édifice avait été incendié, au début du mois de mai. Depuis, une mission de l’Unesco a établi des contacts avec des combattants d’Ansar Dine, qui s’étaient montrés compréhensifs envers les demandes de l’organisation internationale. "Ils s’étaient engagés à ne pas toucher aux manuscrits", rapporte Lazare Eloundou-Assomo. Durant deux mois, les lieux saints de Tombouctou ont été relativement préservés.
TÉMOIGNAGE D'UNE HABITANTE DE TOMBOUCTOU : "C'EST NOTRE RICHESSE, NOTRE HISTOIRE QUI EST DÉTRUITE". Par FRANCE 24
"Il n’y a pas eu de trêve pour autant, poursuit le directeur du pôle Afrique du patrimoine mondial. Ils n’ont pas dit qu’ils arrêteraient le saccage des monuments et nous ont bien spécifié qu’ils souhaitaient empêcher la communauté locale de vénérer les saints et voulaient annihiler cette culture."
Depuis jeudi dernier, la ville a été classée par l’Unesco dans la liste des sites du patrimoine mondial en péril. Cette décision permet à l’organisation internationale d’apporter un appui technique et financier au gouvernement malien pour tenter de préserver Tombouctou et ses manuscrits. Elle semble aussi avoir provoqué la vague de destructions commencée ce samedi.
Photo principale : virtualtourist.com (sachara)
Or, les habitants de Tombouctou ont pour habitude d’aller s’incliner devant les centaines de mausolées qui jalonnent la ville, avant ou après les prières à la mosquée. Celui en l’honneur de Sidi Mahmoud est particulièrement fréquenté dans les périodes de sécheresse, pour prier pour la pluie. Cet édifice avait été incendié, au début du mois de mai. Depuis, une mission de l’Unesco a établi des contacts avec des combattants d’Ansar Dine, qui s’étaient montrés compréhensifs envers les demandes de l’organisation internationale. "Ils s’étaient engagés à ne pas toucher aux manuscrits", rapporte Lazare Eloundou-Assomo. Durant deux mois, les lieux saints de Tombouctou ont été relativement préservés.
TÉMOIGNAGE D'UNE HABITANTE DE TOMBOUCTOU : "C'EST NOTRE RICHESSE, NOTRE HISTOIRE QUI EST DÉTRUITE". Par FRANCE 24
"Il n’y a pas eu de trêve pour autant, poursuit le directeur du pôle Afrique du patrimoine mondial. Ils n’ont pas dit qu’ils arrêteraient le saccage des monuments et nous ont bien spécifié qu’ils souhaitaient empêcher la communauté locale de vénérer les saints et voulaient annihiler cette culture."
Depuis jeudi dernier, la ville a été classée par l’Unesco dans la liste des sites du patrimoine mondial en péril. Cette décision permet à l’organisation internationale d’apporter un appui technique et financier au gouvernement malien pour tenter de préserver Tombouctou et ses manuscrits. Elle semble aussi avoir provoqué la vague de destructions commencée ce samedi.
Photo principale : virtualtourist.com (sachara)
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