Par Wakabi Wairagala
Les avocats de la défense se sont opposés à la proposition de l’accusation de produire un élément de preuve concernant la subordination de témoin de Jean-Pierre Bemba et de ses avocats dans le procès du politicien congolais qui se tient actuellement devant la Cour pénale internationale (CPI).
Le 29 novembre 2013, le procureur Fatou Bensouda a sollicité la permission de soumettre un enregistrement audio, un rapport et un graphique financier, qui « démontreront définitivement que le témoignage d’un témoin spécifique de la défense est celui d’un avocat et non celui d’un témoin ».
Le procureur a décrit la nouvelle preuve comme étant « irréfutable » et d’un « caractère unique », puisqu’elle démontrait des paiements faits par les anciens avocats de M. Bemba, Aimé Kilolo-Musamba et Jean-Jacques Mangenda Kabongo, ainsi que par leurs associés, à 14 témoins de la défense. Il a indiqué que cette preuve réfutait la crédibilité des témoignages de la défense, ce qui justifiait sa soumission.
Mme Bensouda a déclaré que l’accusation n’avait eu connaissance de l’information que pendant la plaidoirie de la défense et avait ensuite mené des enquêtes pour s’assurer de sa véracité avant de la porter à l’attention des juges.
L’avocat de la défense Peter Haynes a toutefois demandé aux juges de rejeter la demande de l’accusation. « Si la preuve que l’accusation cherche à faire admettre était en possession de l’accusation pendant la plaidoirie de la défense et que l’accusation a refusé de la présenter par le biais de témoins de la défense pertinents, l’accusation doit par conséquent être considérée comme ayant renoncé à son droit de le faire », a soutenu M. Haynes dans sa réponse du 15 janvier 2014.
La défense a argué que Mme Bensouda n’avait apporté aucun détail sur le contenu des documents et sur la manière dont ils avaient été obtenus ainsi que sur leur pertinence par rapport aux dépositions des témoins de la défense. Le procureur n’avait, ensuite, divulgué ni l’identité de ces témoins particuliers ni le lien existant entre la preuve et les charges retenues à l’encontre de M. Bemba.
« Il est donc impossible de vérifier la valeur probante de l’élément de preuve dans ce vide informationnel », a précisé M. Haynes. Il a ajouté que l’accusation avait soustrait un élément de preuve important, essentiel pour la procédure, ce qui constituait « une grave violation de l’obligation d’information qui, en soit, justifiait l’exclusion de l’élément de preuve en question ».
Selon M. Haynes, les obligations de divulgation rapide de l’accusation s’appliquaient indépendamment du fait que les procureurs décidaient d’utiliser ou non l’élément de preuve en question.
Il a également soutenu que l’acceptation de l’élément de preuve additionnel dans le dossier de l’affaire aurait un impact sur l’équité et la rapidité du procès car l’équipe de défense devra effectuer de nouvelles enquêtes et rappeler les 14 témoins dont la déposition est concernée.
« À la lumière de ces difficultés avérées et rencontrées par la défense lors des précédentes comparutions de témoins, on ne peut pas présumer que la défense ait la possibilité de les interviewer de nouveau ou de les rappeler afin d’être en mesure de répondre à ces insinuations hautement préjudiciables ou pour mener de nouvelles enquêtes complémentaires », a déclaré M. Haynes.
Il a, de plus, indiqué que les procédures de litige sur l’accès à des documents confidentiels et privés et à leur saisie auprès de M. Bemba et de ses quatre co-accusés, ainsi que sur la présentation des témoignages oraux des cinq suspects pourraient être nécessaires. Cela pourrait exiger que la défense demande une suspension de la procédure pour une durée indéterminée.
Les juges ont autorisé l’accusation à répondre aux affirmations de la défense.
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