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mardi 3 février 2015

Chimpanzé : un cousin sous pression

LE MONDE 
SCIENCE ET TECHNO 
03/02/2015 
Par Vahé Ter Minassian

« Là, sur la droite. Vous voyez ? » Chacun s’efforce de diriger ses jumelles vers la silhouette que Sabrina Krief a repérée au milieu des feuillages. En cette fin de matinée, fait exceptionnel, pas moins de vingt-quatre chimpanzés sauvages se sont réunis dans l’énorme ficus dawei dont la masse imposante se dresse non loin de là. Certains mangent des figues qu’ils sont allés glaner jusqu’à l’extrémité des rameaux ployant sous le poids des fruits. D’autres s’épouillent, en signe de réconciliation, à la suite d’une brève altercation. Quelques-uns se reposent, étendus sur de grosses branches ou assis dans des « nids de jour », fabriqués au moyen de brindilles à la jonction de deux branches. Les mouvements ont beau être lents et le calme régner, il faut plusieurs instants avant qu’apparaisse dans l’oculaire, l’image de l’individu désigné. Cette femelle, baptisée Kyara, explique Sabrina Krief, présente une fente labio-palatine du genre « bec-de-lièvre », encore jamais décrite chez cette espèce. « Des indices », dit-elle, suggèrent que cette « anomalie pourrait avoir pour origine la pollution ». L’un des objectifs de son équipe est de vérifier cette hypothèse. 

Quatre-vingts chimpanzés vivent sur un territoire de 25 km2 
dans le parc national de Kibali, dans l’ouest de l’Ouganda. | 
JEAN-MICHEL KRIEF 


Maître de conférences et primatologue, elle vient de prendre la direction de la toute nouvelle station d’études des chimpanzés de Sébitoli. Installée à 1 500 mètres d’altitude dans le Parc national de Kibalé, à une quinzaine de kilomètres de la ville de Fort-Portal, dans l’ouest de l’Ouganda, et non loin du lac Albert et de la chaîne des Kwenzori qui marquent la frontière avec la République démocratique du Congo, la structure est la seconde du genre dont se dote, à l’étranger, le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris. Elle a été inaugurée le 8 novembre 2014 en présence de l’ambassadeur de France, Sophie Makame, de responsables de l’Uganda Wildlife Authority (UWA, organisme gestionnaire des parcs régionaux en Ouganda) et des représentants des entreprises et entités juridiques ayant contribué financièrement à son implantation. 


« A terme, a promis Thomas Grenon, directeur général du MNHN, elle sera ouverte aux scientifiques de multiples disciplines, qui trouveront sur place lieux de couchage et laboratoires “en dur” pour travailler dans de bonnes conditions. » Mais, dans un premier temps, elle sera surtout consacrée à l’observation de la communauté de chimpanzés qui habite aux alentours. Constitué de 25 km2 de forêts, exploitées à une certaine époque et aujourd’hui en régénération, le territoire de ce groupe, coupé en deux par une route nationale goudronnée, est situé dans une zone périphérique du Parc national de Kibalé (800 km2, interdit d’accès au public). Il a la particularité d’être presque entièrement entouré de zones rurales vouées à la culture du thé, de l’eucalyptus, du maïs et de la banane. Et de concentrer ainsi, dans un petit espace, toutes les formes de menaces pesant sur la population mondiale des grands singes : braconnage, pollution, déforestation, maladies, morcellement et réduction de la taille de l’habitat… 


Aux yeux de Sabrina Krief et de ses collègues, cela en fait un lieu idéal pour évaluer la capacité de ces espèces – classées en danger ou en voie d’extinction, et qui ne sont pas chassées en Ouganda pour leur viande – à s’adapter aux bouleversements de leur milieu. Une thématique d’actualité et de portée générale, à l’heure où, sous l’effet de la pression démographique, les exemples de voisinage entre forte présence humaine et faune sauvage se multiplient et où l’on s’inquiète de leurs conséquences. 

Nul doute que celles-ci soient importantes et diverses ! Un premier recensement effectué par Marie Cibot, l’une des doctorantes de l’équipe, montre qu’à Sébitoli le braconnage est responsable d’un handicap chez pas moins de 28 % des grands singes ! Des pertes ou des paralysies de pieds, de mains ou de doigts, provoquées par des pièges – des collets fabriqués à l’aide de câbles de freins de vélos – destinés à d’autres gibiers et dans lesquels les primates se font prendre. S’ajoutent à ces agressions les effets de la pollution. Les chercheurs ont observé plusieurs cas de malformations, comme des narines de taille réduite ou inexistantes dont l’origine est manifestement environnementale. Sont incriminés l’usage de pesticides ou d’herbicides par les grandes exploitations de thé avoisinantes, l’emploi dans le passé d’agent orange (le fameux défoliant répandu par l’armée américaine durant la guerre du Vietnam) dans cette partie de la forêt, ou encore une éventuelle consanguinité consécutive à l’isolement du groupe dû à la perte d’une partie de son habitat. 

La primatologue Sabrina Krief (à droite) et son équipe de scientifiques, 
dans les bois denses de Sébitoli. | JEAN-MICHEL KRIEF 

Enfin, il est certain que la proximité avec l’homme a profondément modifié le comportement de ces communautés d’animaux sauvages. Comme les éléphants et les babouins, les chimpanzés de Sébitoli ne résistent pas, parfois, à la tentation de sortir des bois pour aller piller les champs de maïs des agriculteurs installés à la bordure du parc. Grâce à des caméras placées à des endroits stratégiques, Sabrina Krief et ses confrères ont appris que ces rapines ne se déroulaient pas seulement durant le jour, mais également la nuit, en l’absence de clair de lune ! Une découverte qui a beaucoup troublé les primatologues car l’espèce était jusqu’ici considérée comme strictement diurne. 

La mise en place de la station de Sébitoli vise justement à leur donner les moyens d’aller au-delà de ces quelques constatations d’ordre général. « Elle nous permettra de lancer des études plus poussées, explique Sabrina Krief. Il pourrait s’agir, par exemple, de déterminer le degré d’intégration sociale des individus touchés par un handicap. Ou de vérifier que les excursions dans les cultures de maïs ne s’accompagnent pas d’échanges de maladies avec l’homme, s’agissant des parasites ou des virus. » Une autre piste consisterait à évaluer l’état de « stress chronique » des animaux en mesurant dans des poils récupérés dans des nids, la quantité d’une certaine hormone, le cortisol. Ou, à terme, à corroborer les données obtenues à Sébitoli avec celles recueillies par Victor Marin, un autre doctorant, sur un site en République démocratique du Congo où demeurent des bonobos. 

Une chose est sûre : il faudra faire preuve de beaucoup de ténacité ! Les chimpanzés, dont l’espèce est qualifiée de « parapluie » – ils jouent le rôle de transporteurs des graines de la canopée sur de longues distances, d’un lieu à l’autre de la forêt –, ont un territoire plus vaste que ceux des autres singes, babouins ou colobes guéréza et bai, dont ils se nourrissent parfois. Le soir, ils construisent en hauteur des nids de branchages. Jamais au même endroit. Et le matin, ils partent en petits groupes à la recherche d’arbres qu’ils fréquentent aussi longtemps que ceux-ci portent des fruits. Le travail des scientifiques s’en trouve ainsi souvent réduit à une sorte d’épuisant jeu de course-poursuite avec les grands singes. Il consiste à prendre la route avant le lever du soleil, afin d’arriver au pied des lieux de couchage au moment du réveil des chimpanzés, à 6 ou 7 heures du matin. Puis, à suivre ces primates dans les bois, en se laissant guider par leurs cris et tambourinages ou en recherchant des traces de leurs passages : déjections, empreintes de pieds et de phalanges, boulettes de végétaux mâchés ou branches cassées. La journée se passe alors à recueillir des échantillons d’urine et de crottes, à observer à distance les individus qui ont pu être reconnus et à noter les changements d’activité de chacun : collecte de nourriture, altercation, repos, copulation, chasse… Et cela, bien entendu, jusqu’à la nuit tombée, vers 18 ou 19 heures, après d’autres parties de cache-cache sous la pluie, dans la boue rouge qui colle aux bottes ou au milieu des étendues d’épineux. Et en évitant à chaque instant, de tomber nez à nez avec l’un des nombreux éléphants qui fréquentent les environs, et que l’on peut entendre le matin barrir tout près dans la brume, derrière un buisson, ou surprendre l’après-midi au milieu de leur bain ! 

A Sébitoli, 28% des chimpanzés présentent un handicap causé par 
les pièges destinés à d'autres animaux. | JEAN-MICHEL KRIEF 

Siège de cet ingrat travail d’investigation, la station de Sébitoli n’aurait jamais pu voir le jour sans l’obstination de Sabrina Krief et de son mari, le photographe Jean-Michel Krief qui, de l’île de Bornéo aux parcs ougandais en passant par le bassin du Congo, a participé à toutes les aventures simiesques de son épouse. Vétérinaire de formation, convertie à la primatologie après une thèse de doctorat, elle est l’une des rares spécialistes françaises du chimpanzé : l’une des six espèces d’hominidés, avec le bonobo, les gorilles de l’Est et de l’Ouest, l’orang-outan de Sumatra et celui de Bornéo, considérées proches de l’homme sur le plan évolutif et sans doute la plus apparentée de toutes à l’être humain. On lui doit d’importants travaux sur l’une de ses activités méconnues : l’élaboration d’une pharmacopée. En effet, depuis une vingtaine d’années, l’observation systématisée du comportement des grands singes a permis de relever des cas d’automédication. De temps à autre, nos proches cousins rechercheraient et sélectionneraient des plantes ou des parties de plantes particulières, ne présentant a priori aucun intérêt nutritif, mais susceptibles de soigner leurs maux bénins : toux, troubles digestifs, fièvre… 

Intriguée par ce comportement, Sabrina Krief a eu l’idée d’analyser, de façon détaillée, le menu d’une communauté de chimpanzés vivant dans une zone du parc national de Kibalé, appelée Kanyawara. Elle a ainsi pu démontrer que divers végétaux, constitutifs du régime alimentaire de ces animaux omnivores, avaient un effet thérapeutique sur l’homme. Que certains étaient déjà employés par les guérisseurs des villages voisins. Et que d’autres contenaient des composés d’intérêt pharmaceutique : molécules aux propriétés antipaludiques, antimicrobiennes ou anticancéreuses. Un résultat qui l’a amenée à s’interroger sur les origines de la médecine et sur sa fonction dans l’évolution… 

S’habituer à la présence des hommes 
En 2007, après dix années passées à suivre dans ses pérégrinations quotidiennes de plusieurs kilomètres le groupe de Kanyawara, Sabrina Krief a été contrainte de se trouver un nouveau terrain de recherche. Ce fut Sebitoli. Un secteur du parc réputé mal préservé, mais où, contre toute attente, devait se révéler l’existence d’une importante communauté de grands singes de 80 individus répartis sur 25 km2. Soit l’une des densités de chimpanzés les plus élevées du monde ! De quoi imaginer la création sur place d’une station dédiée à leur observation… 

Six ans auront été nécessaires pour voir aboutir ce projet, tant il est vrai qu’en matière de description des mœurs des animaux sauvages, le succès dépend des longues préparations. Il s’est agi, tout d’abord, de se repérer et de circuler dans cet habitat. En l’occurrence, des bois denses, au sol recouvert de broussailles et d’herbes à éléphants hautes d’un étage, où la visibilité est souvent réduite à deux ou trois mètres. La petite équipe renforcée de dix assistants de terrain a donc dû commencer par quadriller la zone d’une centaine de kilomètres de chemins (ou « transectes ») taillés parallèlement dans la végétation, du nord au sud et d’est en ouest, tous les 200 ou 300 mètres. Puis, s’est posée la question de savoir comment accoutumer les chimpanzés à la présence des hommes en évitant le don de nourriture. Cette phase d’« habituation » consistant à se fondre peu à peu dans le paysage au point d’en devenir l’un des éléments aussi neutres aux yeux des primates qu’un arbre ou un oiseau, permet à l’observateur, dans une étape ultime, de circuler au milieu des grands singes lorsqu’ils sont au sol, sans déclencher l’alerte et les voir fuir et disparaître en file indienne. A Sébitoli, où le braconnage avait traumatisé nombre d’individus, le résultat n’était pas garanti. On peut maintenant approcher un groupe quand il est dans les arbres. Mais, ailleurs dans le parc où ils travaillent sur d’autres communautés, les professionnels de l’UWA n’y sont pas toujours parvenus. 

Enfin, il fallut faire preuve d’une bonne dose de psychologie ! C’est que, dans la société des chimpanzés, tout est affaire de tempérament. Le fonctionnement d’une communauté dépend non seulement de la hiérarchie avec, au sommet, un mâle « alpha », mais aussi d’un système d’alliances entre fratries et entre sujets masculins ayant grandi sur le même territoire. A cela, s’ajoute le fait que chaque population de grands singes dispose d’un ensemble de pratiques culturelles qui lui sont propres. Danser sous la pluie, « épouiller » des feuilles pour attirer l’attention de la gent féminine, se donner une poignée de mains au-dessus de la tête durant les phases de nettoyage mutuel et faire usage de certains outils comme des baguettes-à-attraper-le-miel ou des éponges-en-feuilles-pour-recueillir-l’eau, constituent ainsi quelques-uns des traits de la communauté de Sébitoli que l’équipe a dû reconnaître. Au même titre que chacun des individus, dont une trentaine ont pour l’instant été décrits. Un long parcours pour enfin pouvoir commencer à mesurer l’impact de l’homme sur le chimpanzé. 

Sur la piste des grands singes 
Observer les grands singes dans leur environnement. Les voir se déplacer dans les arbres et sur le sol. Les regarder construire un nid à l’aide de branchages, communiquer entre eux ou encore utiliser des outils pour récupérer de la nourriture. Telle est la passionnante aventure à laquelle propose de participer, à partir du 11 février 2015, l’importante exposition du Jardin des plantes à Paris consacrée à ces animaux emblématiques. Constitué des chimpanzés, des bonobos, des gorilles de l’est et de l’ouest ainsi que des orangs-outans de Bornéo et de Sumatra, ce groupe de primates réunit les six espèces actuelles considérées comme les plus proches de l’homme. De Tarzan à King Kong, en passant par La Planète des singes, de nombreux livres et films leur ont été consacrés. Sont-ils pour autant bien connus du public ? Sait-on, par exemple, ce qui les caractérise sur le plan morphologique et évolutif et comment se déroule leur existence dans les forêts ? A-t-on une idée claire des menaces qui pèsent sur eux ? Et ce qu’impliquerait leur disparition ? C’est ce que découvrira le visiteur dans un parcours en cinq étapes qui, faisant la part belle aux recherches pluridisciplinaires conduites sur le terrain par les équipes du Muséum national d’histoire naturelle, propose une description véritablement originale du comportement de ces cousins de l’être humain dans leur milieu naturel. Une incursion au cœur de la jungle d’autant plus réaliste qu’elle est agrémentée de sculptures en taille réelle de grands singes et de nombreux spécimens naturalisés dont certains proviennent des riches collections de la vénérable institution parisienne. 

Exposition « Grands singes ». 
Du 11 février 2015 au 21 mars 2016. 
Muséum national d’histoire naturelle. 
Jardin des plantes. 
Grande Galerie de l’évolution, 
36, rue Geoffroy-Saint-Hilaire, Paris 5e. 

Tous les jours de 10 heures à 18 heures sauf le mardi et le 1er mai. 

Renseignements : 01-40-79-54-79 / 56-01. www.grandssinges.fr

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