SCIENCE ET TECHNO
03/02/2015
Par Vahé Ter Minassian
« Là, sur la droite. Vous voyez ? » Chacun s’efforce de diriger ses jumelles vers la silhouette que Sabrina Krief a repérée au milieu des feuillages. En cette fin de matinée, fait exceptionnel, pas moins de vingt-quatre chimpanzés sauvages se sont réunis dans l’énorme ficus dawei dont la masse imposante se dresse non loin de là. Certains mangent des figues qu’ils sont allés glaner jusqu’à l’extrémité des rameaux ployant sous le poids des fruits. D’autres s’épouillent, en signe de réconciliation, à la suite d’une brève altercation. Quelques-uns se reposent, étendus sur de grosses branches ou assis dans des « nids de jour », fabriqués au moyen de brindilles à la jonction de deux branches. Les mouvements ont beau être lents et le calme régner, il faut plusieurs instants avant qu’apparaisse dans l’oculaire, l’image de l’individu désigné. Cette femelle, baptisée Kyara, explique Sabrina Krief, présente une fente labio-palatine du genre « bec-de-lièvre », encore jamais décrite chez cette espèce. « Des indices », dit-elle, suggèrent que cette « anomalie pourrait avoir pour origine la pollution ». L’un des objectifs de son équipe est de vérifier cette hypothèse.
Quatre-vingts chimpanzés vivent sur un territoire de 25 km2
dans le parc national de Kibali, dans l’ouest de l’Ouganda. |
JEAN-MICHEL KRIEF