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dimanche 22 mars 2015

« La Fabrique des barbouzes » : Monsieur Charles, nouveau citoyen congolais...

Le Monde Afrique 
16/03/2015
Par Jean-Pierre Bat

En amont du colloque Foccart qui réunit les 26 et 27 mars, les spécialistes de cet homme de l’ombre et le gotha des archivistes et historiens d’Afrique francophone, « Le Monde Afrique » propose une série autour de cet événement. Durant toute la semaine seront publiés des articles autour de Jacques Foccart et de la question des archives, donc de la mémoire en Afrique francophone.

Pour inaugurer cette série, « Le Monde Afrique » publie en exclusivité les bonnes feuilles du livre La Fabrique des barbouzes, histoire des réseaux Foccart en Afrique (Nouveau Monde Editions, à paraître le 19 mars). Voici le premier extrait :

L'abbé Fulbert Youlou, premier président de la République du Congo de 1959 à 1963.
Crédits : Archives personnelles / JP Bat 

Les personnalités françaises qui se sont rendues à Brazzaville pour le premier anniversaire de la République du Congo, le 28 novembre 1959, ont constaté que l’abbé Youlou était suivi de près par un Européen, seul membre de la suite officielle qui n’ait été présenté à aucune personnalité venue de Paris. Finalement, un délégué français s’enquiert auprès de Youlou de son identité : « Comment, on ne vous l’a donc pas présenté ? Mais c’est Monsieur Delarue, qui veille sur ma sécurité personnelle. »  
Au-delà du caractère anecdotique « barbouzard », cet épisode, traité par L’Express sous le titre « Un nouveau citoyen congolais : Charles Delarue », témoigne de la place de l’ancien inspecteur des renseignements généraux (RG) : un peu en retrait protocolaire, mais véritable pilier de la sécurité à Brazzaville. 


Représentant du Sdece [Service de documentation extérieur et de contre-espionnage] en charge du dossier congolais depuis 1956, « Monsieur Maurice », sur les conseils de Jean Baylot [ancien préfet de police, à l’intérêt prononcé pour les affaires congolaise], aurait présenté « Monsieur Charles » à l’abbé Youlou lors d’une de ses venues en France au cours du premier semestre 1959. 

En juillet 1959, Youlou établit un contrat de travail de deux ans pour l’ancien inspecteur des RG pour y « assurer le fonctionnement d’un Bureau de documentation et d’études », c’est-à-dire le service de renseignement de la République congolaise baptisé le Budes. 

Finalement, si aucun lien officiel ne relie Delarue aux institutions françaises, permettant ainsi aux représentants officiels de la République française de se désolidariser de son action si nécessaire, il n’en reste pas moins un pion essentiel, conscient mais inavoué par le pouvoir, du dispositif anticommuniste imaginé par Foccart comme par les services de renseignement français. 

Surveiller et punir : au service secret de l’abbé Brazzaville, mai 1960 
Un vaste coup de filet est lancé au Congo, à trois mois de la proclamation d’indépendance prévue pour le 15 août 1960. Des arrestations sont opérées à Brazzaville, Pointe-Noire et Dolisie, les trois principales villes du pays. Au sein de l’opposition, sont principalement visés des cadres d’organisations syndicales et de jeunesse. Le ministre de l’intérieur n’a été prévenu, pour ainsi dire, que la veille de l’opération. Celle-ci a été pilotée par la présidence de la République et le Budes. 

Loin d’être une foucade sécuritaire, comme cela a pu apparaître dans le faux-semblant d’une décolonisation africaine officiellement pacifique, cette opération est l’aboutissement d’une politique pensée et mûrie depuis 1959 pour asseoir définitivement le régime de l’abbé Youlou, « ami de la France » et atout essentiel dans l’échiquier géopolitique de la guerre froide en Afrique. La coulisse de cette opération permet de mettre au jour les rouages de la politique du pré carré au Congo, par-delà les explications aseptisées des rapports officiels ou les témoignages enflammés mais fragmentaires et faussés. 

Ce passage derrière le rideau fait voler en éclats l’apparente (et officielle) dichotomie entre une haute représentation française se refusant à toute ingérence, d’une part, et, d’autre part, une équipe de « barbouzes » au service de l’abbé Youlou. 

"Monsieur Charles", à droite, en chemisette. Photographie non datée. 
Crédits : Archives personnelles / JP Bat 

Cette opération met également au jour une stratégie de lutte anticommuniste plus complexe et réaliste qu’il n’y paraît. Plus complexe, car la répression s’articule avec une politique de « formation » politique. Plus réaliste, car la menace dite communiste ne correspond évidemment pas dans l’esprit de ces « barbouzes » à un éventuel « coup de Prague » tropical, mais à une course contre la montre en Afrique centrale, aux portes du grand Congo belge, point de fixation continental de la guerre froide. Quelle part prend donc le Budes de « Monsieur Maurice » et « Monsieur Charles » dans cette lutte anticommuniste ?

Brazzaville, septembre 1960
Dans les rues de Poto-Poto, le quartier africain de Brazzaville, « Monsieur Charles » rencontre « Mahamadou », un sorcier nigérien proche des cercles de pouvoir congolais. Ce dernier finit par lui confesser qu’avec du sable foulé par Patrice Lumumba [premier ministre de la République démocratique du Congo de juin à septembre 1960, il sera assassiné le 1er janvier 1961] , il prépare un filtre chargé de rendre invisible un commando chargé d’approcher Lumumba, à l’insu de ses gardes et des soldats ghanéens, pour le tuer.

« Monsieur Charles » est sceptique et voit dans cette histoire moins un tour de magie qu’un tour de passe-passe négocié à 1 million de CFA par « Mahamadou » : il est, d’ailleurs, plus réputé pour ses poisons que pour ses filtres d’invisibilité. Néanmoins, le policier poursuit ses questions moins pour connaître les détails de l’attentat (qu’il considère voué à l’échec) que pour percer au jour la personnalité politique qui se cache derrière le bras de « Mahamadou ».

Le sorcier lui aurait confessé, sous le sceau du secret, le nom du commanditaire : un homme très haut placé – qu’il n’a pas été possible d’identifier formellement. Deux jours plus tard, Daniel, le secrétaire de « Monsieur Charles », vient au rapport : Patrice Lumumba est toujours bel et bien vivant.

Rien de surprenant pour Delarue, qui attend, en réalité, moins des nouvelles de Lumumba que des informations sur la réaction du commanditaire. Les hommes du commando, après avoir débarqué à Léopoldville [devenue Kinshasa en 1966], auraient constaté, face aux soldats de l’autre rive, que la formule d’invisibilité ne fonctionnait pas comme leur avait promis « Mahamadou ».

Face à la colère du commanditaire, le sorcier, qui a pris la précaution préalable de se faire payer avant la tentative d’attentat, a justifié l’échec de ses filtres en plaidant que le féticheur de Lumumba devait être plus puissant que lui puisqu’il avait rendu visibles des tueurs protégés par sa formule d’invisibilité. 

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