Le Potentiel
25/04/2011
Leur tour venu, les conseils des prévenus impliqués dans l’assassinat de Floribert Chebeya et de Fidèle Bazana sont décidés d’arracher leurs clients des griffes du ministère public.
Ce lundi 25 avril, la défense débute ses plaidoiries dans le procès qui oppose le ministère public aux assassins présumés de Floribert Chebeya et Fidèle Bazana. La bataille s’annonce âpre, vu les cinglantes plaidoiries des parties civiles et le dur réquisitoire du ministère public qui a réclamé cinq peines capitales.
A ce sujet, la défense avait déjà donné le ton au cours de l’instruction, arguant que Floribert Chebeya et son chauffeur ne sont jamais arrivés à l’Inspection générale de la Police dans l’après-midi du 1er juin 2010. Et pour le décès de Fidèle Bazana, elle exige la présence de la dépouille mortelle, en alléguant que le jugement rendu par le tribunal de Grande instance de Kinshasa/Gombe ne suffit pas, et ne pourra servir à la veuve que pour l’héritage.
Aussi, la même défense soutient que les cinq prévenus qui se trouvent en ce moment dans le box des accusés sont innocents. La preuve, disent les avocats du colonel Daniel Mukalay, en est que leur client avait remis son argent aux experts de la police scientifique pour aller enquêter sur la scène du crime à Mitendi.
En outre, la partie prévenue dit que dans son réquisitoire, le ministère public n’a apporté aucune preuve de culpabilité des prévenus en détention, et qu’il n’a fait que se baser sur des présomptions. En un mot, la défense reconnaît que Floribert Chebeya est mort, mais refuse que ce décès soit imputé au colonel Daniel Mukalay. Quant aux autres prévenus, ils ne sont liés ni de près ni de loin dans cette affaire.
Il faut noter qu’exprimant l’amertume des parties civiles sur ce double assassinat, le bâtonnier Jean-Joseph Mukendi wa Mulumba a dit aux juges de la Cour militaire de Kinshasa/Gombe que la meilleure expression de ces sentiments leur a été révéle lors de la visite qu’un groupe d’avocats des parties civiles a rendu au siège de la Voix des Sans Voix, où notamment ils ont eu une séance de travail avec le directeur exécutif de la VSV, en présence de la veuve Bazana, de son frère et de son enfant.
A cette occasion, le directeur exécutif de la VSV, Dolly Ibefo Mbunga, leur a demandé de jeter un coup d’œil au calendrier accroché au mur. Là, un carré de la date du jour renvoyé encore à la position de juin 2010, comme pour indiquer que le compteur était arrêté ce jour-là. Et Dolly a commenté : « C’est Floribert qui avait ajusté le dernier la date…Nous modifierons seulement quand la vérité sera connue. C’est alors que le rythme normal reprendra ».
Modèle de courage
Le bâtonnier Mukendi a aussi fait savoir que c’est à la demande des veuves Chebeya et Bazana qu’ils ont placé devant la Cour deux chaises vides sur lesquelles sont placées les photos des victimes. Cette présence discrète de Chebeya et Bazana par le calendrier interposé et les deux chaises vides, a fait savoir l’avocat de la partie civile, lui remet en mémoire un film du temps de sa jeunesse, il y a 40 ans quand il terminait son doctorat en droit à l’Université de Liège. Le film était intitulé « Zorba le Grec » et relatait l’histoire douloureuse de l’enterrement d’un jeune révolutionnaire grec tombé sous les balles des dictateurs de l’époque.
Au moment où tout le monde pleurait pour amener sous terre le héros, son jeune frère quitta précipitamment la foule et s’éloigna pour dessiner par terre la lettre « Z », l’initiale du nom de son frère. Et il entama la chanson que voici : « Il est vivant, Zorba ! ». Et toute la foule répondit : « Zorba est vivant… ». Et le bâtonnier d’ajouter : « C’est ce même regain d’énergie qui nous entraîne dans notre choix de ralliement pour dessiner alternativement par ces plaidoiries : ‘’C’’, il est vivant et encore ‘’B’’, il est vivant. En effet, Chebeya vit, Bazana vit ».
Pour le bâtonnier Jean-Joseph Mukendi wa Mulumba en effet, ces deux héros vivent à travers le message de démocratie légué aux activistes des droits de l’homme. Ils vivent à travers la flamme de leur engagement. Ils vivent au travers du modèle de courage. Ils vivent de par le sacrifice suprême qu’ils ont accepté. Ils ont donné leurs vies pour être présentés comme héros aux jeunes Congolais et à toutes les personnes passionnées des droits humains.
Enfin, le bâtonnier Mukendi a exhorté la Cour militaire en ces termes : « Notre conviction, qu’ils sont vivants, sera rendue dans les exposés qui suivent. Mais ils seront réellement vivants et le compteur des jours pourra repartir lorsque votre Cour et la justice feront connaître la vérité sur l’assassinat de Chebeya, et les circonstances de la mort de Fidèle Bazana. C’est là le défi que les parties civiles vont affronter ».
Mais la vérité jaillira-t-elle bientôt ? Ici, le bâtonnier Jean-Joseph Mukendi wa Mulumba a déclaré à la Cour que la réponse se trouve avec un autre célèbre avocat français, Me René Floriot, qui a écrit un livre au titre évocateur et intitulé : « La vérité tient à un fil ». Livre où il a mis son expérience de grand avocat d’Assises au service d’un roman sur la justice à travers l’histoire d’un procès où l’entrepreneur de travaux publics Darleau est assassiné chez lui.
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