L'Echo du 06/08/2011
Michel Lauwers
L’institution est née en pleine crise, il y a 85 ans, pour résorber le déficit de la colonie congolaise.
Après le krach de 1929, les finances du Congo belge sont au plus mal. Léopoldville accuse un déficit de 192 millions de francs. Les principales recettes de la colonie proviennent des taxes à l’exportation de ses principales matières premières: cuivre, huile de palme, etc. Avec la crise, les prix de ces produits se sont effondrés, comprimant d’autant les recettes du Congo. La Belgique métropolitaine ne peut pas simplement desserrer les cordons de sa bourse pour lui venir en aide. La Charte coloniale, rédigée lors de l’incorporation de l’État libre du Congo en 1908, prévoit en effet de maintenir une stricte séparation entre les finances publiques belges et congolaises. C’est donc la quadrature du cercle pour le gouvernement belge.

Paul Tschoffen charge son chef de cabinet, René-François Detry, de jeter les bases de la nouvelle Loterie coloniale. Ce juriste de formation nullement spécialisé faut-il le dire? dans le secteur des jeux de hasard doit tout inventer en quelques semaines.
Ce n’est pas une sinécure car il s’agit tout à la fois de rédiger un règlement, dessiner et faire imprimer les billets dans des conditions de sécurité suffisantes, créer une campagne de publicité et monter un réseau de vente. Un exploit… qu’il va réaliser haut la main.
Le 18 octobre, le premier tirage de la Loterie coloniale est organisé au Cirque Royal. Demi-succès à la clé, car ses inventeurs ont commis quelques erreurs de jeunesse: le prix unitaire des billets était par exemple trop élevé (100 francs). Dès le second tirage, il sera réduit de moitié tandis que des billets sont divisés en cinquièmes.

De secours, africaine puis nationale
Durant la guerre, privée de contact avec le Congo, la Loterie change d’objet et de nom. Rebaptisée Loterie du Secours d’hiver par une loi du 20 décembre 1940, elle affecte ses bénéfices à l’aide aux enfants et aux victimes de la guerre. La Loterie redevient "coloniale" une fois la paix retrouvée: elle apporte son soutien non seulement au Congo mais aussi à diverses organisations humanitaires et à des associations patriotiques.
Avec l’accession du Congo à l’indépendance, sa mission coloniale disparaît. La Loterie devient "africaine" l’espace de deux ans, puis dès 1962 elle est rebaptisée "nationale" et placée sous la tutelle du ministre des Finances. Ses profits sont répartis entre deux types de mission: le financement de projets dans les "pays en voie de développement" ou celui d’objectifs d’utilité publique.
Un soutien aux arts et au sport
Au tournant des années 70 et 80, ses missions sont élargies. Elle pourra désormais soutenir aussi des projets sportifs, artistiques ou culturels, environnementaux, scientifiques… Et agir également par la voie du sponsoring. L’équipe cycliste Lotto voit ainsi le jour en 1984.
Grosse évolution aussi en 1991, lorsque la Loterie devient entreprise publique autonome, puis en 2002 lorsqu’elle est muée en société anonyme de droit public, avec comité de direction, conseil d’administration et contrat de gestion. Les nouveaux défis sont la libéralisation du secteur et les développements des jeux en ligne.
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