07/07/2012
Christopher Froome a remporté samedi 7 juillet la première étape de montagne du Tour de France 2012. Ce natif de Nairobi a fait des émules sur le continent. Longtemps en retard, les coureurs africains rattrapent aujourd'hui le peloton mondial.
Explication.
Christopher Froome vainqueur de la 7e étape du Tour de France, 7 juillet 2012.
REUTERS/Stephane Mahe
À l'œil nu, impossible de discerner les trois coureurs africains qui participent au Tour de France 2012, du reste du peloton.
Mais Christopher Froome peut rentrer dans l'histoire à sa manière.
Âgé de 27 ans, ce cycliste à l'aise sur tous les terrains, peut légitimement nourrir l'espoir de monter sur le podium du Tour. Un exploit jamais réalisé par un Africain.
Coéquipier de Bradley Wiggins, le grand favori de l'épreuve, le natif de Nairobi, deuxième de l'édition 2011 de la Vuelta et 4e du dernier Dauphiné Libéré en juin, a une carte à jouer dans une édition qui s'annonce indécise en l'absence d'Andy Schleck et Alberto Contador.
«Je pense qu'il peut gagner le Tour», confie Pierre Carrey, membre de l'Union Cycliste Internationale (UCI) et fin connaisseur du cyclisme africain, interrogé par Slate Afrique. En cas de victoire, ce serait pourtant les couleurs de l'Union Jack qui se dresseraient sur les Champs-Elysées.
Né au Kenya, à Nairobi en 1985, Christopher Froome s'envole pour l'Afrique du Sud lors de son adolescence. De mère Kényane et de père Britannique, il commence sa carrière sous les couleurs du pays de Jomo Kenyatta. Il représente même son pays natal aux Championnats du monde du contre-la-montre en 2006.
Après un passage par l'équipe sud-africaine de la Barloworld, il rejoint la puissante formation Sky en 2009 et opte pour le maillot britannique.
«Mais il reste très africain par son côté extrêmement calme et sa grande patience», dit de lui Pierre Carrez qui l'a brièvement côtoyé.
«Une belle performance de sa part en Juillet serait un formidable coup de projecteur pour le cyclisme africain», ajoute ce dernier.
Le développement du cyclisme africain
Passé par le Centre mondial du cyclisme (CMC) de l'UCI, implanté à Aigle en Suisse, Chris Froome est un exemple pour les futures étoiles d'un continent en plein essor question vélo.
Au CMC, un espace qui offre a de jeunes coureurs cyclistes appartenant à des pays ne disposant pas de structures de haut niveau de s'entrainer, des Éthiopiens, Érythréens ou Algériens suivent les traces du coureur de Sky.
L'Afrique de l'Est, longtemps un nain sur la carte du cycliste mondial, est en première ligne.
L'Érythrée, où le vélo fait figure de sport roi –tradition italienne, l'ancienne puissance coloniale– pourrait devenir à l'échelon continental, ce qu'est la Colombie pour l'Amérique du Sud.
Adulés à Asmara, les grimpeurs Natnael Berhane (21 ans) où Daniel Teklehaimanot (23 ans) nourrissent l'espoir d'effectuer leur entrée prochaine sur le Tour de France.
Le premier à battu le Français Jérôme Pineau (Quick-Step) au sprint sur une étape du dernier Tour du Gabon. Ce qui lui a valu une bel hommage de l'expérimenté puncheur:
«Je suis très heureux d'avoir été battu par un Érythréen. C'est un beau symbole.»
Le second, 6e du Tour de l'Avenir en 2009 –la compétition de référence chez les jeunes– est passé professionnel au sein de l'équipe Orica-GreenEdge, présente sur le Tour et qui compte dans ses rangs des cadors du peloton tels Simon Gerrans où Michel Albasini.
L'ambition de MTN
«Je pense que Daniel Teklehaimanot a des qualités qui peuvent lui permettre de rêver et de participer à la Grande Boucle», disait de lui Michel Thèze son ex-entraîneur au CMC, dans une interview accordée à un magazine néerlandais l'an dernier.
La progression du cyclisme africain passe cependant par un développement des structures d'entraînement sur place.
«Il n'y a pas de saturation avec le cyclisme en Afrique», déclarait récemment Patrick McQuaid, l'influent patron de l'UCI.
Mais, «l'Afrique ne doit pas devenir un supermarché pour les équipes européennes, comme c'est le cas en football», précise Pierre Carrey.
Un centre continental de l'UCI a vu le jour en Afrique du Sud à Potchefstroom, près de Johannesburg. Les fédérations africaines y envoient leurs meilleurs coureurs, qui ont ainsi la possibilité de s'entraîner dans des conditions idéales pour décrocher un contrat dans une équipe du circuit professionnel.
«Une construction pyramidale»
Plusieurs des jeunes coureurs formés au centre de Potchefstroom ont ainsi rejoint les rangs de la formation MTN Qhubeka. Cette équipe sud-africaine fondée en 2007 et évoluant dans le circuit Continental de l'UCI (seconde division mondiale), ambitionne de recruter les meilleurs cyclistes africains et de participer au Tour de France à l'horizon 2015.
Plusieurs pépites du centre, comme l'Éthiopien Tsgabu Grmay et les Érythréens Meron Russom, Jani Tewelde Weldegabi, ont déjà rallié les rangs de MTN.
«C'est une construction pyramidale», glisse un responsable du pôle Afrique de l'UCI.
«Nous aidons les fédérations nationales à développer leurs infrastructures, puis nous accueillons les meilleurs espoirs au sein de notre centre continental, avant de les laisser s'envoler dans les équipes pro.»
Loin de ces espérances en un futur radieux, Christopher Froome entend bien conjuguer l'histoire au présent pour devenir le premier coureur d'origine africaine à monter sur le podium du Tour.
Une performance qui semble à sa portée après sa démonstration de force conclut dans les lacets de la montée de la Planche des Belles Filles dans les Vosges samedi 7 juillet, lors de la première étape de montagne du Tour de France 2012.
Quatre-vingt-dix neuf ans ans après le Tunisien Ali Neffati, premier athlète du continent à avoir participer à la Grande boucle, Chris Froome peut emmener le cyclisme africain dans une autre dimension.
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