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jeudi 19 mars 2015

« La Fabrique des barbouzes » : deux nouveaux venus à Brazzaville

Par Jean-Pierre Bat
Le Monde.fr 
17/03/2015

Le président congolais Fulbert Youlou (troisième à droite) 
en compagnie du général de Gaulle et d'autres personnalités,
au château de Champs-sur-Marne, 22 novembre 1961. Crédits AFP

En amont du colloque Foccart qui réunit les 26 et 27 mars à Paris, les spécialistes de cet homme de l’ombre et le gotha des archivistes et historiens d’Afrique francophone, « Le Monde Afrique » propose une série autour de cet événement. Durant toute la semaine seront publiés des articles autour de Jacques Foccart et de la question des archives, donc de la mémoire en Afrique francophone. 

Pour inaugurer cette série, « Le Monde Afrique » publie en exclusivité les bonnes feuilles du livre La Fabrique des barbouzes, histoire des réseaux Foccart en Afrique (Nouveau Monde Editions, à paraître le 19 mars). 


Voici le troisième extrait :

L'abbé Fulbert Youlou le 15 juin 1959 à Brazzaville, en route pour aller voter. 
Crédits AFP

« Monsieur Jean », missus dominicus de Foccart à Brazzaville 
Jean Mauricheau-Beaupré est un artisan inconditionnel de l’action psychologique. A Jacques Foccart, il explique ce concept qui « va des graffitis jusqu’au terrorisme » dans une note datée du 12 février 1960. La nomination de Foccart au poste de secrétaire général de la Communauté en mars 1960 constitue un accélérateur des ambitions de Jean Mauricheau-Beaupré. Foccart ne compte pas laisser dépérir un tel talent. 

Mauricheau aborde le Congo dès le mois de mai 1960, par l’entremise de Charles Delarue [ancien officier des Renseignements généraux devenu conseiller de l’abbé Fulbert Youlou. A lire : « Monsieur Charles, nouveau citoyen congolais »]. À l’été 1960, Foccart accepte de le dépêcher comme son agent personnel à Brazzaville auprès de l’abbé Youlou. 

La feuille de route officieuse de Mauricheau pour le Congo Léopoldville reprend directement la ligne foccartienne appliquée aux anciennes colonies françaises : balkanisation et anticommunisme. Son voyage Paris-Brazzaville à l’été 1960 n’est que le premier d’une longue série. 

Adepte du gaullisme intégriste, Mauricheau se présente en Afrique comme le neveu du général, renforçant d’autant plus son influence auprès de ses interlocuteurs. Enfin sur le terrain, Mauricheau se voit comme un des artisans-clés de la politique africaine gaulliste. Selon lui, le triomphe de la politique de grandeur, chère à de Gaulle, passe par la protection du pré carré (héritage direct de la Communauté) qu’il convient de défendre face aux autres puissances, aussi bien contre le communisme que contre les Etats-Unis. Cette protection passe par la constitution d’une « famille africaine », capable d’une certaine autonomie et d’un certain poids sur la scène internationale, derrière la France gaulliste. La XVe session de l’ONU, qui s’ouvrit en septembre 1960, constitue un moment-clé selon Mauricheau. 

Il n’hésite pas à forcer le protocole pour obtenir une place dans la délégation congolaise qui part pour l’ONU en septembre 1960. Malgré les indépendances, Mauricheau-Beaupré continue pourtant à défendre la Communauté auprès de Youlou. Avec un demi-succès : si la Communauté est morte, les chefs d’Etats de l’ex-AEF ont conscience de la nécessité d’une union pour pouvoir coexister à côté des grands ensembles régionaux dont ils subissent la pression. 

L’abbé Youlou, entretenu par « Monsieur Jean » dans le rêve communautaire, propose en mars 1962 de repenser les relations franco-africaines à partir d’une Communauté non plus « rénovée » comme en 1960, mais « repesée ». En vain. Comment mieux expliquer la dévotion gaulliste de Mauricheau, sinon en utilisant ses propres termes pour qualifier la politique française en Afrique : « le plan de Gaulle ». Cependant, Mauricheau ne vient pas seul lorsqu’il s’attelle au dossier congolais : il engage avec lui le financier secret de ses projets, du Courrier de la Colère à « Progrès et Communauté ». 

Franz Saar, dit François Demichel : le vrai-faux Colombine

Franz Saar, dit François Saar-Demichel qui fut un personnage de l'ombre 
des réseaux Foccart pour mener à bien des opérations au Congo. 
Crédits : Archives personnelles / JP Bat

Dans le sillage de Mauricheau, est emmené à l’automne 1960, un personnage de l’ombre essentiel pour mener à bien certaines opérations au Congo : François Saar-Demichel. Si Foccart s’attache à minimiser son rôle, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un acteur de la coulisse, volontairement oublié, mais au rôle de premier ordre quoique peu visible.

Né à Stagno (Croatie, territoire de l’empire Habsbourg) en 1910, Franz Saar est donc originaire d’Autriche-Hongrie. Etudiant remarqué (diplômé de l’Ecole des hautes études commerciales et de l’Ecole des sciences politiques de Vienne), membre influent des jeunesses socialistes autrichiennes, lieutenant de réserve de l’armée tchèque, francophile convaincu, il quitte l’Autriche à la suite de l’Anchluss et gagne la France comme réfugié politique le 24 octobre 1938.

Agent de renseignement à l’efficacité éprouvée durant la résistance et appréciée depuis 1939, il est tout naturellement intégré à la Direction générale des études et de la recherche (DGER), qui l’envoie en mission en Italie pour assurer la liaison entre l’état-major des troupes alliées et les partisans italiens. Assimilé au grade de capitaine, il est redirigé en Autriche pour exécuter la même mission avec les partisans autrichiens jusqu’à la fin de la guerre. Parmi toutes les distinctions dont il est paré à la fin de la guerre, la plus importante à ses yeux est sans conteste sa naturalisation française en 1947, sous le nom de François Demichel, son pseudonyme de guerre (dans les faits, il dispose de papiers militaires à ce nom depuis septembre 1945).

Dès le 1er juin 1945, il est admis à la mission militaire française en Allemagne pour le compte de la DGER : il est nommé chef du renseignement politique en Autriche, et exécute plusieurs missions en Yougoslavie et en Tchécoslovaquie (Vienne, Prague, Budapest et Trieste). Le 1er juin 1947, il est nommé chef du service d’action politique clandestine du Sdece, héritier de la DGER, au siège du boulevard Suchet.

Ardent gaulliste depuis la guerre, Demichel devient dans les dernières années de la IVe République le financier du Journal de la colère. S’étant lié d’amitié avec Mauricheau, le principal animateur de cette feuille après Debré, il continue à soutenir ses efforts en finançant « Progrès et Communauté » en 1960. Rôdé aux affaires d’espionnage et grand argentier de l’ombre, c’est donc tout naturellement à lui que Mauricheau fait appel comme mécène de l’abbé Youlou. Il en réfère à Foccart en octobre 1960.

Très rapidement, ses efforts se concentrent sur le projet grandiose du barrage du Kouilou. Car l’enjeu économique est de taille : en concurrence avec le barrage d’Inga dans l’ancienne colonie belge, le Kouilou pourrait donner la primauté économique à Brazzaville en Afrique centrale.

Demichel sollicite donc ses contacts allemands : le consortium Schneider-Hochtief doit composer avec les groupes français Péchiney et Ugine. Finalement, les institutions françaises (de Gaulle en tête) désavouent cette initiative car elles redoutent l’arrivée de capitaux allemands dans le pré carré : le Kouilou doit être intégralement français ou ne pas être. Il ne sera pas. C’est le grand échec économique de la République du Congo. Mais moins que l’affaire du barrage en elle-même, c’est le rapport de Demichel aux institutions françaises qui est très éloquent : tous les dirigeants le désavouent officiellement, Foccart et Debré les premiers, dans les premiers mois de 1961.

La présence d’un tel intrigant « barbouzard » est devenue plus difficilement tolérable pour ces anciens activistes gaullistes parvenus aux ors de la République et à des fonctions aussi honorables qu’officielles. Ils s’efforcent d’effacer toute proximité entre eux et Saar-Demichel. Ce qu’ils lui reprochent essentiellement est d’oser officieusement parler au nom de la République… Du reste, il ne le fait que dans la mesure où Mauricheau lui garantit le parapluie élyséen. D’où le ton particulièrement sec de Jacques Foccart et de Michel Debré à l’égard d’un de leurs plus fidèles soutiens. Dès lors, faut-il suivre Foccart pour minimiser et marginaliser le rôle de Demichel ?

« Saar-Demichel a été introduit au Congo, par Mauricheau-Beaupré, pour régler des affaires financières, je crois. Mais il ne s’en est pas occupé longtemps et c’est, à ma connaissance, la seule occasion à laquelle il s’est occupé de l’Afrique », confie Jacques Foccart au cours de ses entretiens avec Philippe Gaillard (Foccart parle, tome 1, Fayard / Jeune Afrique).

Rien n’est moins vrai : mais force est de reconnaître que désormais Demichel poursuit son entreprise africaine dans la coulisse. Il reste le grand argentier d’une grande partie des opérations officieuses dans les deux Congo. Au début de l’automne 1960, il rencontre un autre barbouze dénommé Maurice Bat avec lequel il se lie d’amitié et il collabore étroitement jusqu’à devenir le financier et l’intermédiaire de plusieurs de ses opérations pour le compte du Sdece. Mauricheau, dans une note à Foccart datée du 14 octobre 1960, fait un compte rendu.

Foccart n’ignore rien des activités de Saar-Demichel, pas plus que de celles d’autres barbouzes, même s’il le nie officiellement. Car à partir de la fin de l’été 1960, la France s’engage officieusement depuis Brazzaville dans une politique à haut risque dans le Congo ex-belge. En Afrique hors du pré carré, la couverture politique est encore moins garantie pour les « barbouzes » que sur le sol des anciennes colonies françaises.

A suivre ...

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