Congo Indépendant
08/03/2011
Un élément de la garde prétorienne de "Joseph Kabila". Photo d’archives |
Une dizaine de jours après l’attaque de la résidence présidentielle dimanche 27 février dernier, il apparaît que les officiels congolais n’ont pas dit la vérité. Certains «détails» non relevés dans les communiqués officiels montrent bien que le ministre de la Communication et des médias, porte-parole du gouvernement, a menti. C’est le cas notamment du nombre de tués au sein des FARDC. Une dizaine de jours après cette «opération», les noms des assaillants arrêtés restent frapper du sceau du «secret défense». Il apparaît de plus en plus que les «agresseurs» ne seraient autres que des membres de la garde prétorienne de « Joseph Kabila », abusivement appelée « Garde républicaine ». De même aucun indice ne vient confirmer la thèse d’une agression venue «du côté du fleuve Congo» comme le suggère la presse kabiliste. L’association de défense des droits humains «Asadho » demande la mise sur pied d‘une «commission d’enquête indépendante». Mission : «faire la lumière» non seulement sur l’attaque de la résidentielle présidentielle et le camp Kokolo mais aussi celle de l’aéroport de Lubumbashi, le 4 février.
Enquête
Les auditeurs de la radio Okapi ont suivi lundi 7 mars les lamentations d’une maman congolaise, non autrement identifiée, qui réclamait la restitution de la dépouille mortelle de son frère. Militaire des Forces armées de la RD Congo, l’homme a été tué lors de l’attaque de la résidence présidentielle le dimanche 27 février.
«Je demande au gouvernement de nous donner des nouvelles de notre frère qui est tombé sous des coups de balles le dimanche passé. On n’a pas encore vu son corps et on ne peut pas faire son deuil. Sa femme et ses enfants sont maintenant menacés de quitter le camp militaire. Nous voulons aussi que le gouvernement nous indemnise parce qu’il est mort dans son travail».
Quelques heures après cette "attaque", le ministre de la Communication et des médias, Lambert Mende, a fait état de «six tués» parmi les assaillants. Il est resté muet en ce qui concerne le bilan des victimes du côté des FARDC. Interrogé dimanche 6 mars par radio Okapi, Mende a reconnu que les «corps des victimes», seraient gardés "pour besoin d’enquête". Au nom de quel principe, les autorités judiciaires congolaises peuvent-elles garder le corps d’un soldat tombé au combat sous prétexte que des investigations seraient en cours? La dépouille du soldat tué serait-elle le corps du délit ou du crime ?«Une enquête a été ouverte à l’auditorat militaire des FARDC. (…), les corps des victimes font partie du dossier judiciaire. Seul l’auditeur militaire peut nous donner le moment où il peut remettre les corps aux familles», a déclaré Mende. «C’est aussi à l’issue de cette enquête que seront déterminées les réparations auxquelles pourront avoir droit les parents des personnes tombées au cours de cette attaque», a-t-il ajouté. Les propos du ministre de la Communication ne suggèrent-ils pas que des militaires FARDC seraient impliqués dans les événements du dimanche 27 février ? A contrario, pourquoi voudrait-on expulser du camp Kokolo la famille d’un soldat qui a péri en plein exercice de son travail ? Règlement de comptes ou sanction?
Garde républicaine
Dans son édition n°2617, datée du 6 au 12 mars 2011, l’hebdomadaire parisien donne, sous la plume de Fabienne Pompey, son envoyée spéciale à Kinshasa, une version de faits qui met en cause la «Garde républicaine», autrement dit la garde présidentielle. Selon ce magazine, la résidence présidentielle aurait été attaquée par une «trentaine d’hommes en civils, bardés de gris-gris et armés de machettes». S’agissant de «l’incident» survenu au Camp Kokolo, le journal croit savoir qu’un «commando de la Garde républicaine» faisait partie des assaillants. «La GR, explique Jeune Afrique, n’est pas un groupe homogène. En son sein se sont retrouvés des soldats de différents groupes armés, et surtout de différentes origines ethniques (ils viennent pour l’essentiel, du Maniema, du Nord Katanga et des Kivus. Ces 12000 hommes ne sont guère mieux lotis que le reste des troupes. (…) .» Selon «J.A», «des rancoeurs liées à de récents avancements pourraient également avoir poussé un groupe ou un autre à la révolte.» Pour le magazine parisien, les accusations articulées à l’encontre des Enyele, du général Faustin Munene et des hommes de Jean-Pierre Bemba sont loin d’être étayées. «J.A» n’a pas manqué de relever quelques incongruités. Il y a d’abord la rapidité avec laquelle le ministre Mende a apaisé l’opinion en déclarant que «tout était rentré dans l’ordre». Et ce, «deux heures à peine après les premiers coups de feu (…)» dans une affaire présentée dans un premier temps comme une «tentative de coup d‘Etat». «Aucun couvre-feu n’a été décrété, l’incident était officiellement clos», note cette publication.
A Kinshasa, le sénateur Henri-Thomas Lokondo Yoka (majorité présidentielle), a, le lendemain de cette attaque, dénoncé des «dysfonctionnements» au sein des services de sécurité et exigé des «sanctions» à l’encontre des responsables des services de sécurité devenus des affairistes. Certains médias kinois, n’hésitent pas à suspecter certains milieux politiques lesquels voudraient, selon eux, «empêcher» le président sortant "de rééditer l’exploit de 2006." D’autres journaux kinois imputent - sans apporter le moindre début de preuve -, l’attaque du dimanche 27 février à «certains éléments» des FARDC issus du MLC. Au motif que ceux-ci s’estimeraient «mal intégrés» au sein de l’armée nationale.
Commission d’enquête indépendante
Dans un communiqué daté de lundi 7 mars, l’association de défense des droits humains «Asadho» se dit «vivement préoccupée» par les informations relatives à l’attaque de la résidence présidentielle et demande la mise en place d’une «commission d’enquête indépendante» chargée de faire la lumière non seulement sur l’attaque du 27 février mais aussi sur celle survenue le 4 février à l’aéroport de Lubumbashi. Se fondant sur des informations en sa possession, le groupement donne son «bilan» sur les événements du 27 février. A savoir : Sept insurgés tués à la résidence du président de la République; deux militaires de la Garde Républicaine (GR) tués ; Un enfant de dix ans résidant dans l’immeuble ex GLM, répondant au prénom de Jonathan, blessé par balle ; Un capitaine des FARDC, non autrement identifié, tué au niveau du Camp militaire Kokolo.
L’association fait, par ailleurs, état de l’arrestation d’une «cinquantaine de personnes, civiles et militaires». A en croire l’Asadho, ces personnes sont détenues en «quatre endroits» suivants : cachot de GLM (Gombe); cachot PM du camp militaire Kokolo dans la Commune de Ngaliema; la 3ème Direction générale de l’Agence nationale des renseignements(ANR) dans la Commune de la Gombe et Prison de Ndolo dans la Commune de Barumbu. Ces «prévenus» sont privés «du droit de visite de membres de leurs familles et de l’assistance de Conseil». L’association égrène des noms : Le capitaine Bimoli de l’état-major renseignements militaires (ex Demiap), arrêté depuis le 01 mars 2011 ; Monsieur Tito Karawa Zobo, âgé de 30 ans, finaliste de l’ISTA (Institut supérieur des techniques appliquées) de l’année 2010, arrêté le 02 mars 2011. Il a été déshabillé devant les membres de sa famille au motif qu’il fallait vérifier s’il n’avait pas de blessures par balles ; Monsieur Karawa Rabbi, âgé de 22 ans, étudiant en 1ere année graduat à l’UPC (Université protestante du Congo) arrêté le 02 mars 2011; Le commandant Mungiro Zangi, affecté au GLM, qui a été arrêté depuis le 02 mars 2011, Monsieur Hubert Eyale Lomela, chargé des projets à l’Eglise du Christ au Congo (ECC) et son ami Monsieur Jimmy Kweyi Ndombasi, tous deux arrêtés le 27 février 2011 dans la résidence du premier cité.
Procès équitable
«Ces faits, note l’Asadho, rappellent ceux survenus à Lubumbashi, en date du 4 février 2011, à l’issue desquels seize personnes dont treize éléments de la Garde Républicaine ont été arrêtés, et sont toujours détenus pour «violation de consignes, dissipation des munitions de guerre, fuite devant l’ennemi et mouvement insurrectionnel», à la prison de la Kasapa, sans procès".
Le groupement recommande au gouvernement «de mettre sur pied une commission d’enquête indépendante (…) en vue d’établir les responsabilités et de punir les coupables» et «de faire respecter les droits fondamentaux des personnes arrêtées notamment les droits de bénéficier d’un traitement qui préserve leur vie, leur santé physique et mentale ainsi que leur dignité; d’entrer immédiatement en contact avec leurs familles ou leurs conseils conformément à l’article 18 de la Constitution de la RDC, et d’être jugées dans un délai raisonnable ou alors d’être relâchées conformément à l’article 6 de la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.»
B.A.W
© Congoindépendant 2003-2011
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire